Une personne sur cinq fera l’expérience de la dépression au cours de sa vie, selon les chiffres de l’OMS. La science nous aide à mieux comprendre la dépression et à développer les interventions de santé de demain qui aideront les personnes concernées. ComPaRe Dépression vous présente régulièrement un article scientifique important pour vous tenir au courant des avancées.
RESUME DE L’ARTICLE
Cet article, intitulé « Nouveaux traitements et traitements émergents pour la dépression caractérisée », publié dans le Lancet, propose un examen approfondi des traitements biologiques pour le trouble dépressif, tout en mettant en lumière leurs mécanismes d’action potentiels et leur possible future utilisation clinique.
Le contexte de cette recherche
Les auteurs commencent par un constat préoccupant sur le poids de la dépression, soulignant sa prévalence, ses effets handicapants sur la vie quotidienne, ainsi que son association avec un risque accru d’idées suicidaires et d’autres problèmes de santé surajoutés. Les traitements existants, qu’ils soient pharmacologiques ou psychosociaux, sont souvent insuffisants, en particulier pour les personnes souffrant de dépression modérée ou sévère, ou pour celles qui ne réagissent pas aux antidépresseurs traditionnels.
Que peut-on apprendre de cette étude ?
Cette revue se concentre sur les traitements émergents, classés en plusieurs catégories :
Modulateurs des récepteurs NMDA
La kétamine et l’eskétamine, qui sont des antagonistes des récepteurs NMDA, ont montré des effets antidépresseurs rapides, notamment chez les personnes atteintes de dépression résistante aux traitements antidépresseurs conventionnels. Bien que leurs effets soient souvent temporaires, des recherches sont en cours pour évaluer l’intérêt et la sécurité d’emploi à long terme. Dans cette catégorie, le dextrométhorphane et l’esméthadone sont en cours d’exploration également.
Stimulation cérébrale
La stimulation magnétique transcrânienne (TMS) et la stimulation transcrânienne à courant direct (tDCS) sont des techniques non invasives de stimulation cérébrale prometteuses pour un certain nombre de patients souffrant de dépression, notamment résistante. La stimulation cérébrale profonde est une modalité plus invasive réservée aux formes sévères et encore très éloignée d’une utilisation en routine clinique. Les niveaux de preuve des techniques de stimulation restent débattus, et d’autres études sont nécessaires pour déterminer les paramètres d’application optimaux et leur efficacité à long terme.
Modulateurs du neurotransmetteur GABA
La brexanolone intraveineuse est un modulateur des récepteurs du GABA qui a été approuvé aux Etats-Unis pour la dépression postpartum, démontrant le potentiel de cibler les voies de transmission GABAergiques pour traiter la dépression. La glucosamine, un autre modulateur de GABA, présente également un certain potentiel, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires.
Agents anti-inflammatoires
Le rôle de l’inflammation dans la dépression suscite de plus en plus d’intérêt. Bien que plusieurs agents anti-inflammatoires aient montré certains bénéfices (oméga 3, statines, minocylcine, celecoxib, aspirine), les preuves scientifiques de leur réelle efficacité restent à ce jour insuffisantes et des recherches plus solides sont nécessaires pour déterminer leur véritable potentiel.
Psychédéliques
La psilocybine et l’ayahuasca ont démontré des effets antidépresseurs rapides dans plusieurs études. Cependant, les données sont encore relativement limitées, et d’autres recherches sont nécessaires pour confirmer leur sécurité d’utilisation et leur efficacité.
Autres agents
L’article explore également d’autres traitements potentiels comme la pimavanserine et la photobiomodulation.
La conclusion des auteurs
Les auteurs concluent que des progrès significatifs ont été réalisés dans la compréhension des mécanismes biologiques de la dépression et dans le développement de nouveaux traitements. Bien que beaucoup de ces options soient encore à un stade préliminaire, elles offrent un espoir pour le traitement de la dépression, notamment pour les formes résistantes. Ils soulignent l’importance de poursuivre la recherche afin d’établir la sécurité, l’efficacité et les effets à long terme de ces nouveaux traitements. Ils insistent également sur la nécessité de développer une médecine de précision qui adapte le traitement aux caractéristiques individuelles des patients.
Que peut-on retenir de cette étude ?
Cette revue propose un aperçu clair de l’évolution rapide des traitements biologiques pour la dépression. Elle met en évidence les possibilités d’améliorer le pronostic de cette maladie, tout en soulignant les défis qui restent à relever. Les auteurs appellent à un effort de recherche soutenu, en insistant sur les besoins individuels des patients et la nécessité d’une approche globale pour traiter cette maladie courante, qui demeure un enjeu majeur de santé publique.
*Résumé et adaptation française de l’article de Marwaha S. et ses collègues : Novel and emerging treatments for major depression. Lancet 2023 : https://doi.org/10.1016/S0140-6736(22)02080-3
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